Trente ans, déjà !

Publié le par Albocicade


"Le Gué" a trente ans.

Ce n'est pas rien.

Enfin, surtout pour ceux qui connaissent cette "maison d'accueil".

Je n'ai pas vécu les débuts, lorsque c'était "bénévolat à plein temps", et que "plein temps" n'était pas une figure de style.

Quand ce qui était produit sur la ferme servait à nourrir les personnes en détresse qui se présentaient là, parce que quelqu'un leur avait dit…

Quand les permanents étaient "salariés" (ce qui leur ouvrait des droits à la sécu), mais reversaient l'intégralité de leur salaire … et se trouvaient finalement "au pair"…

Au fil des ans, des subventions sont venues s'ajouter aux maigres ressources procurées par la vente des légumes et volailles sur le marché : les salaires purent être conservés.

Au fil des ans, aussi, il y eut beaucoup de changements parmi les équipiers… quelques années de ce régime a de quoi venir à bout des plus résistants…

Enfin, de presque tous.

Quand je suis arrivé comme éducateur, ne restait plus – de l'équipe d'origine – que "le père André". Fondateur, directeur, certes ; mais surtout idéaliste, utopiste, pétri d'une confiante naïveté en l'humain… cette "naïveté" qui fait parfois des miracles.

Et les accueillis étaient presqu'exclusivement des poly-toxicomanes. Un des "publics" les plus difficiles avec lesquels j'ai eu à travailler.

C'était toutefois étonnant de voir ces jeunes, qui pour la plupart avaient une histoire familiale douloureusement vécue derrière eux, l'appeler "mon père".

Deux mots à priori sans enjeu affectif, un titre plutôt (après tout, André n'est-il pas prêtre, camillien ?), mais qui leur faisait du bien au cœur.

A l'époque, j'avais noté une sorte de ressemblance entre "André", et le personnage décrit par Robert Lamoureux dans son "Eloge de la fatigue"  (on a aussi le texte ici).

Il n'était pas seul, bien sûr : travaillant avec lui (et pas toujours sans friction !) toute une équipe. Je n'y suis resté que quelques mois (comme quoi, je ne fais pas partie des plus résistants), à l'époque où l'on fêtait les vingt ans du Gué.

[D'ailleurs, à cette occasion, nous avons eu la visite surprise de sœur Emmanuelle. Le contraste était frappant entre cette "vieille religieuse" pleine de vie et d'enthousiasme et les accueillis, pour certains déjà presque moribonds.]

Depuis, dix ans se sont encore écoulés. Toute l'équipe a changé, et le "père André" a pris sa retraite de directeur… tout en continuant à demeurer sur place et "à donner des coups de main"… égal à lui-même.


Pourtant, malgré le changement déquipe, le Gué continue son œuvre.

J'ai encore pu le constater, justement pour les "30 ans"...


Publié dans Cigale sociale

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