Rue de la Jussienne

Il fut un temps, pas si lointain, où l'on débattait sur la question des racines chrétiennes de l'Europe. La question devait sans doute être malséante, puisqu'elle a disparu de la pensée collective. Pourtant, que ce soient les arts, l'architecture, la littérature, rien ne se comprend en France (et dans le reste de l'Europe) si l'on ignore ce que fut, ce qu'est le christianisme qui reste partout présent, même là où l'on ne l'attendrait pas.

Puisque nous en sommes au cinquième dimanche de carême, dédié à Ste Marie l'Egyptienne, je voudrais mentionner une petite rue du deuxième arrondissement de Paris : la "rue de la Jussienne".

Une rue sans grâce particulière, longue de quelques dizaines de mètres, prise entre la Rue Montmartre et la Rue Etienne-Marcel.

Quel rapport entre cette "rue de la Jussienne" et le christianisme ?

A dire vrai, le rapport ne saute pas aux yeux de prime abord. Pourtant, qu'est-ce que ce mot de "Jussienne" ?

Si l'on remonte le temps, on se rend compte que ce nom est l'aboutissement d'une succession de déformations puisque cette rue s'est précédemment appelée (du plus récent au plus ancien) "Rue de la Gipecienne", "Rue de la Gypecienne", "Rue de l'Égyptienne", "Rue de l'Égyptienne-de-Blois" et avant cela "rue Sainte-Marie-en-l'Égyptienne"¹.

En effet, au XIII° siècle déjà, on pouvait aller dans cette rue et prier dans la chapelle dédiée à St Marie l'Egyptienne², chapelle qui subsista durant des siècles avant d'être détruite en 1792 par les amis de la Liberté, admirateurs des Lumières et parents des laïcards d'aujourd'hui.

Alors oui, à effacer les traces visibles, on en vient à faire oublier...

Reste donc aux chrétiens d'aujourd'hui d'être des témoins, chacun là où il peut l'être, en fonction de ses capacités, compétences, facilités...

Notes...

1La rue semble s'être appelée "rue du coq-héron" avant de prendre le nom de la chapelle locale.

2Ste Marie d'Egypte fut particulièrement populaire en occident au Moyen-Age, en particulier avec la diffusion de sa Vie dans la Légende dorée de Jacques de Voragine.