Silence

Publié le par Albocicade

Je n'ai pas une grande affection pour Scorsese. Et pour tout dire, je ne suis pas sûr qu'il y soit vraiment pour quelque chose. L'histoire remonte à longtemps, pas loin de 30 ans. Me basant sur ce que j'entendais dire, avant même la sortie du film et donc par des gens qui ne l'avaient pas vu, j'ai détesté ce cinéaste et sa "Dernière tentation du Christ".

Qui étaient ces gens qui mélangeaient copieusement "honneur du Christ" et appel à la haine[1] ? En fait, je n'en sais rien.

Ce film méritait-il autant de mépris ? Je n'en sais rien non plus : je ne l'ai jamais vu, et cela ne me manque pas. Mais j'ai gardé au fond de moi le sentiment extrêmement déplaisant de m'être laissé manipuler au moyen d'informations frelatées. Une sévère leçon que je n'ai jamais oublié : toujours vérifier les informations, chercher les sources, voir si les moyens sont compatibles avec la fin que je me propose.

Donc, et peut-être pour de mauvaises raisons, je n'aimais guère Scorsese. Ce qui ne devait pas trop le chagriner, d'ailleurs.

Et puis, il y a eu ce film, "Silence".

J'en avais entendu parler à sa sortie, et ce que j'en entendais dire me semblait mériter  attention.

Et ce week-end, je l'ai vu.

Que dire ?

Alors que la critique assassinait "Mission", j'avais aimé ce film.

Quand la critique ignorait "L'île", ce film m'a porté.

Et là... pour "Silence", je reste sous une profonde impression.

Oh, certes, il y a bien quelques longueurs dans ce film, quelques facilités dans la mise en scène... mais le propos porte juste, profond.

Faut-il connaître l'Histoire du Japon pour entrer dans le film ? Je n'en sais rien. N'étant pas du tout un spécialiste de Cipango, je connaissais seulement un peu l'histoire de la mission jésuite au Japon, la manière dont ils ont été bien accueillis au début – au moins dans certaines régions – avant qu'une vague "nationaliste" ne transforme cette bienveillance en rejet puis en persécution violente. Je savais que cette persécution avait fermé la porte du Japon aux chrétiens pour deux siècles. Au fond, c'était suffisant pour entrer dans le film, pour m'interroger sur le déchirement que peut constituer une situation sans sortie, sans échappatoire comme celle que vivaient ces chrétiens.

Résumer le film, le propos... je ne le pourrais pas sans caricaturer, sans déformer, sans trahir les innombrables nuances qu'il porte.

Sans doute faut-il le voir.

Et pour ma part, je suis reconnaissant à Scorsese de l'avoir fait.

 

[1] Pour mémoire, le cinéma parisien qui projeta ce film finit dans un incendie...

Publié dans Vie quotidienne

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S
Le film est tiré du livre de l'écrivain japonais Shûsaku Endô (1966), excellente relation de cette part de l'histoire japonaise et chrétienne;
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