Joni

Publié le par Albocicade

J'avais 17 ans. Converti de fraîche date, je lisais1 le récit de Joni Eareckson, cette jeune américaine qui s'était brisé la nuque suite à un bête plongeon. Hospitalisation ; détresse, espoirs et désespoirs : le verdict était tombé... paraplégique. Jamais plus elle ne marcherait, jamais plus elle ne pourrait tenir un crayon, un livre, une raquette de tennis... jamais plus elle ne pourrait s'habiller seule, ou même simplement se brosser les cheveux. Jamais plus elle...
La révolte avait envahi sa jeunesse : sa vie s'était achevée dans un lamentable bruit de vertèbre brisée.
La foi, qui l'avait jusque là accompagné presque naturellement, lui parut intolérable, insensée, odieuse.
Et pourtant, alors qu'elle n'en attendait plus rien, elle retrouva le Christ.
En rééducation, elle apprit à se tenir dans son fauteuil, puis à tenir un crayon ou un pinceau, pour peindre et dessiner.
Avec quoi ? Avec ses dents.
Bien entourée, elle réinvestit sa vie, découvrit une nouvelle profondeur dans sa foi, et au bout de quelque années avait écrit ce témoignage, que je lisais. Mieux, elle chantait. Non pas que les choses aient été simples, et j'écoutais dans ses albums "Joni's song" et "Spirit wings"des titres d'une incroyable profondeur. J'appris, un jour, qu'elle s'était mariée, et je n'en fus pas peu étonné. Pensez : elle était tout de même tétraplégique.
C'était il y a longtemps.
Tellement longtemps que, lorsque mes filles se retrouvèrent – l'une après l'autre – en fauteil roulant, et que la paralysie n'était pas une option inenvisageable, pas une fois le souvenir de Joni ne me rejoignit dans mes préoccupations.
Et puis tout dernièrement, je tombais sur une biographie récente de Joni Eareckson-Tada, acquisition de mon épouse.
Une vague de mémoire me saisit, et je me lançais dans cette lecture. J'y retrouvais la figure de cette jeune fille, bien sûr, mais aussi... celle de ses parents.
Et je me suis revu, poussant le fauteuil roulant, pestant contre les trottoirs mal fichus, contre le sol inégal qui faisait comme de petits coups de marteau dans la colonne de ma fille...
Si à 17 ans je m'étais, d'une certaine manière, identifié à cette jeune chrétienne de 17 ans ; là je me retrouvais dans ce père totalement désemparé, et néanmoins aussi présent que possible.
Et comme depuis le temps de mes 17 ans, le monde a pas mal évolué – techniquement parlant – je suis allé chercher un peu, savoir ce qu'elle était devenue.
Au fil des nombreuses années écoulées, elle s'est énormément investie avec son association dans l'accueil, l'aide et le soutien aux personnes handicapées dans de nombreux pays, en particulier via les églises protestantes.
Une vie consacrée à Dieu et aux handicapés...
Et il y a quelques jours, entourée de l'affection de son époux, Ken, elle a fêté ses 72 ans.
Une sacrée vie qui ne s'est finalement pas arrêtée quand elle avait 17 ans.
 
P'tite note pour un copain :
1Merci Samy de m'avoir prêté ce bouquin à l'époque !

Publié dans Vie quotidienne

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L
Merci pour cette belle réflexion, Elisabeth
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