Le visage du Christ

"Le plus beau des fils de l’homme", telle est la description du "Roi au trône éternel et au sceptre d'équité"[1] que l'on trouve dans un psaume[2]. Or si cette description a quelque chose de l'éloge outrancier pour un roi terrestre, elle va bien pour Celui qui – terrestre – est d'origine céleste, divine, le Christ.

Aussi ce psaume a-t-il été compris comme une annonce prophétique du Sauveur, de sorte que les représentations que l'on en fait (qu'il s'agisse des fresques des catacombes, des icônes, ou encore des statues diverses et variées) le montre en "bel homme", au visage parfaitement équilibré, aux traits fins, calqués sur les canons de beauté locaux[3].

L'idée est louable, certes, mais elle pose un problème puisque dans un autre texte, le Messie est dit s'être montré "sans beauté ni éclat, ni aimable apparence"[4].  Bref, pas exactement l'image moderne du "beau gosse".

Et là tout dernièrement, je tombe sur cette fresque, ce visage du Christ.

Epoustouflant !

Oh, je sais, vous me direz… non, en fait, je ne sais pas ce que vous me direz.

Mais moi, ce visage m'a fait penser à un enfant, un petit "Nicolas" que j'ai connu il y a longtemps, à l'époque où nous fréquentions parfois la même paroisse que ses parents.

Un enfant atteint du syndrome de Treacher-Collins. A l'époque, il devait avoir 6 ou 7 ans, mais déjà il avait une simplicité désarmante, une gentillesse, une forme de maturité peu commune. Puis, nos routes ont bifurqué et nous nous sommes perdu de vue. Je l'ai revu récemment, dans un reportage : l'enfant est devenu depuis un jeune homme. J'étais heureux de le voir ; comme on retrouve un ami cher, perdu de vue depuis trop longtemps.

Et je sais une chose : la beauté n'est pas une question esthétique, "décorative". La beauté vraie est une expression du cœur et pourrait tout aussi bien s'écrire "bonté".

Et puis, lorsque j'ai cherché l'origine de cette fresque, j'ai eu la surprise de voir qu'elle se trouve dans une ancienne église de Prizren, au Kosovo ; l'église  "Saint Nicolas"…

Les toujours indispensables notes :

[1] Selon les formules dithyrambiques en usage dans les cours d'Orient

[2] Psaume 45 selon l'hébreu, Ps 44 selon la Septante

[3] Ce qui nous a donné, par exemple, des images pieuses au "Jésus" blond, mais aussi, depuis quelques années dans certains courants des représentations d'un "Jésus" noir qui n'a rien de sémite mais semble né en Afrique sub-saharienne…

[4] Isaïe 53.2-3