Une histoire de silence
"Le silence sera le langage du siècle à venir" écrivait St Isaac le Syrien.
Sans doute est-ce pour cela que les anges savent se faire discrets.
N'empêche, lorsque j'ai vu le film, il y a quelques années, j'ai fait – immobile – un de ces voyages dont j'aurais à peine osé rêver, sans toutefois parvenir jamais à le réaliser.
En effet, non seulement il y faudrait des fonds dont je ne disposerai jamais, mais il faudrait en outre être au bon endroit au bon moment, pouvoir rencontrer les bonnes personnes, parler des langues dont j'ignore jusqu'à l'alphabet…
De Kiji sous les neiges de Carélie, à Patmos brûlée de soleil, en passant par Lalibella ou Alep, c'est un voyage dans la foi, dans le chant de la foi à travers les langues, les cultures, les Traditions ; un voyage à travers les Histoires des peuples, à travers le présent de l'Histoire de l'Eglise …
Un voyage en images et en sons, en chants et mouvements, en joie et prière…
Aussi, lorsque dernièrement on m'a offert le livre, je me suis plongé dedans en me demandant bien où il allait me mener : un film, c'est une chose, un livre autre chose.
Et de fait, ce n'est pas une "copie papier" du film, mais plutôt le "journal de voyage", les coulisses du tournage, le chemin de rencontres, de projet et de caméra.
Et bien plus que cela.
Bien plus, puisqu'entre deux étapes, on se plonge, à coup de "difficultés", "d'apories" et de "scholies" dans la réalité des anges. Qui sont-ils, et quel est leur rapport au temps ? Où sont-ils, et y en a-t-il un nombre défini ? Sont-ils faillibles ou infaillibles, corporels ou incorporels ; comment sont-ils regroupés par "classes", et quelle part ont-ils dans l'Histoire du Salut ? Ce sont là les questions, et quelques autres qui sont abordées joignant la perspective biblique et le regard des Pères de l'Eglise pour des réponses tout en nuances.
Sans doute ce que j'ai lu de plus instructif sur la question. Faisant la part à la diversité des opinions, mais aussi la part du mystère ; d'une immense richesse et pourtant clair et accessible mais sans jamais devenir simpliste ni scolaire.
Et bien sûr à mille lieues des élucubrations des tenants du new-age et autres fadaises.
Bref, un livre précieux.
Un dernier mot ?
Merci à Jean-François Colosimo pour avoir osé un tel livre (et à l'équipe de tournage d'Olivier Mille pour avoir osé un tel film !)
PS :
Pour achever ce billet, j'ai choisi cette photo, extraite du film, de Dimitri Koutilla en train de chanter, en arabe, une hymne du Vendredi saint, au milieu des ruines de ce qui fut un des plus fameux monastères du premier millénaire : Qalat-Semaan, le monastère de St Syméon le Stylite.
Je ne peux, sans trembler, entendre cet homme, âgé, chanter ainsi :
En ce jour est suspendu à la croix
celui qui suspendit la terre sur les eaux…