La solitude du batteur de fond
Boum, tac ; boum, tac
Alors que les autres sont debout, il est assis.
Boum, tac ; boum, tac
Devant eux, les autres ont des partitions soigneusement posées sur des lutrins ; lui n'a que son instrument.
Boum, tac ; boum, tac
Les autres, groupés par instruments, discutent entre eux de points de détail à chaque pause ; lui est seul.
Boum, tac ; boum, tac
Les autres, tous les autres, produisent des mélodies aussi élégantes que rythmées qui s'entre-répondent ; lui ne fait que "boum, tac ; boum, tac…"
Pourtant, il ne semble pas affecté de cet état de fait, et même il arbore un jovial sourire.
Nul doute, d'ailleurs, qu'il ait raison : malgré cet apparent isolement, ce semblant de déconnection du groupe, son "boum, tac" est la colonne vertébrale des musiques les plus élaborées.
S'il cesse un instant – ou pire, s'il est absent – le rythme se met à dériver, les uns accélérant, les autres ralentissant selon la petite musique intérieure de chacun, et rapidement ne surnage qu'un "mauvais son", une "cacophonie".
Je ne vais pas ici chercher qui, dans mon entourage, dans l'Eglise, dans la société a ce rôle apparemment effacé et pourtant indispensable… à chacun de nous de le voir, ou non.
Et si, parfois, on se sent un peu sur la touche, avec des activités bien ordinaires, trop ordinaires, peut-être sommes-nous précisément dans la situation du "batteur"…
Au fait, depuis quelques semaines, j'accompagne – auditeur – la jeune cigale aux répétitions de la fanfare locale… mais vous vous en doutiez un peu…