Festen
Ce fut le premier film "Dogme 95", expression qui désigne une sorte de label cinématographique lié à des contraintes de prise de vue : caméra portée à l'épaule, lumière naturelle… On est loin de la débauche d'effets spéciaux à laquelle nous sommes peu ou prou habitués.
Cependant, ce ne sont pas des considérations techniques ou esthétiques qui m'amènent à considérer "Festen" comme un film important : c'est le thème.
Car, parmi les innombrables sujets importants, il y a des parents pauvres.
Et l'inceste en est incontestablement un.
Un immense tabou, tellement insupportable à envisager qu'il suscite surtout, par une sorte de réflexe de protection, de l'indifférence au quotidien.
Le mérite de "Festen" n'est pas tant d'aborder la question de l'inceste, que de le faire de manière aussi juste.
Dans son film, Vinterberg laisse s'exprimer les réactions des protagonistes, à commencer par le déni sous toutes ses formes, sous tous ses prétextes.
Mais aussi le déchirement intérieur ; la fragmentation des intentions et de la volonté ; la violence des sentiments et des frustrations ; la profondeur de blessures presque indicibles.
Cependant, et c'est là une autre des forces de ce film, tout cela se fait sans voyeurisme : l'histoire se passe au cours d'une fête de famille, tous les personnages sont adultes, et les seules évocations d'un passé lointain sont verbales.
Cependant, il ne faut pas s'y tromper : malgré cette apparente distance, le traitement du sujet est tel qu'il implique émotionnellement le spectateur.
Et, pour le dire simplement, ce n'est pas du tout un film pour enfants (d'ailleurs, aucun enfant ne devrait savoir ce qu'est l'inceste).
Maintenant, si l'on veut seulement voir un film de divertissement, et qu'on le veuille danois, il y a le "Festin de Babette" : c'est très bien aussi.
Au risque de paraître insistant, je laisse les coordonnées de l'association fondée par Isabelle Aubry