Humour en archipel

Il y a un humour "grand public", que tout le monde ou presque peut comprendre. Des blagues que l'on peut sortir dans à peu près n'importe quel contexte, et dont on sait qu'elle susciteront des réactions entre le petit sourire et la franche hilarité ; des jeux de mots que l'on peut faire en passant sans avoir besoin de les expliquer longuement, sans s'attirer des regards éberlués.
Et il y en a l'humour communautaire, l'humour qui n'a de sens que dans un groupe donné aux codes fortement marqués, un humour qui fonctionne comme un signe d'appartenance.
Tout le monde ne sait pas apprécier une blague de geek, un trait d'esprit de footeux, une saillie d'éleveur ovin, un calembour de bougnat.
Le problème avec ce genre d'humour, c'est donc de trouver dans son entourage des connaisseurs, des personnes capables de l'apprécier pleinement, d'en savourer toute la finesse.
Et c'est là que les réseaux sociaux créent une nouvelle possibilité. Ainsi, si j'ai personnellement souri lorsque j'ai vu la photo placée ci-avant, et que j'ai croisé 3 fois rien qu'"hier soir sur FB, je sais qu'il serait vain de prétendre la partager au travail, ou avec mes voisins. On est certes au-delà de la "private joke", mais les personnes susceptibles de l'apprécier immédiatement – ou même après explication – n'abondent guère dans ma campagne. D'où mon idée d'archipel : les membres d'une même "confrérie humoristique" peuvent être comme les îles d'un archipel : trop éloignées pour avoir des contacts directs, mais faisant pourtant partie du même groupe.
Que ceux qui en ont saisi le sens et la drôlerie au premier coup d'oeil se sentent libres de sauter le paragraphe qui suit. Pour les autres, je vais tenter un décryptage : préparez vos zygomatiques, vous allez rire. (ou pas).
Si en France, le Père Noël est bien différencié de St Nicolas (qui d'ailleurs est abondamment ignoré), ce n'est pas le cas aux Etats-Unis, où le Père Noël est appelé Santa-Claus (dérivé de Saint Nicklaus).
Or, que ce soit en France ou ailleurs, la grande question pour les enfants, lorsqu'ils voient un Père-Noël de magasin, c'est "Est-ce que c'est le vrai ?".
Or, il se trouve que l'authentique St Nicolas, confesseur de la foi, évêque de Myre en Lycie au IV° siècle, a lutté contre les thèses ariennes qui prétendaient que le Christ n'aurait pas été de nature divine, mais aurait été une créature suréminente, d'une nature "ressemblante" à celle du Père. Le débat – à l'époque de St Nicolas et ensuite – s'est donc cristallisé sur ces deux termes : "Homo-ousios" (ὁμοούσιος = de nature identique, de "même nature"), ou, au contraire, "Homoï-ousios" (ὁμοιούσιος = de nature ressemblante, semblable).
Poser la question à "Santa" est donc un moyen sûr de savoir si c'est le vrai.
Je sais, une blague ne vaut que si elle n'a pas besoin d'être expliquée.
J'ai aussi vu une variante, bien française celle-là :
Que l'enfant dise au Père-Noël / St Nicolas : "Jésus était juste une créature".
S'il ne réagit pas, ce n'est pas le vrai St Nicolas.
Le problème, c'est que, si c'est le vrai St Nicolas, l'enfant risque de recevoir une gifle...
Bonne fête de St Nicolas à tous !