Semaine sainte 2014
(ou : "La patrie").
Dimanche dernier, jour des Rameaux.
Durant la procession autour de l'église, je médite sur l'interdiction qui avait été faite par l'émir Amr Ibn al-As que les croix soient vues en dehors des Eglises, et sur l'autorisation contraire accordée par le calife Omar, y compris pour le jour des Rameaux*.
Ainsi l'émir, comme aussi la République concordataire, voyait dans les processions une menace politique. A contrario, le calife Omar accorda toute liberté à l'évêque jacobite Gabriel, car ce dernier était "du parti des Arabes".
Est-ce à dire qu'il n'était pas patriote, cet évêque qui n'appelait pas à la lutte contre l'envahisseur ?
Je ne saurais répondre à une telle question… peut-être parce qu'elle est mal posée.
Quelle était sa "patrie" ? Etait-ce ce bout de terrain que foulaient ses sandales ? Etait-ce cette région, ces montages et ces vallées où l'on parlait un dialecte, où l'on avait une manière de vivre, de se saluer, de travailler la terre ? Sans doute, oui.
Mais pas seulement.
Sans doute aurait-il pu appeler à la Résistance… c'est tellement plus glorieux que la "collaboration". Mourir en martyr après avoir étripé ces mécréants… Mais est-ce là une mort de martyr ?
"Crois-tu donc que je ne pourrais pas demander à mon Père, qui m'enverrait sur le champs plus de douze légions d'anges ?" dit Jésus à Pierre qui veut le défendre par l'épée, au moment de son arrestation, le soir du jeudi saint. (Mt 26.53)
Et lorsque Pilate le questionne sur sa Royauté, Jésus répond : "Mon royaume n'est pas de ce monde" (Jean 18.36).
Peut-être est-ce parce qu'il savait que sa patrie c'est le Royaume du Sauveur que cet évêque n'est pas entré en guerre. Peut-être est-ce pour une autre raison, je l'ignore.
D'autres sont entrés en guerre, et je serais bien mal venu – confortablement installé dans un pays en paix – de prétendre le leur reprocher.
Juste, je regarde mon Roi : il est couronné, et sa couronne est d'épines.
Note
* On trouve cela dans le document que j'ai signalé dernièrement.
** Pendant que j'y pense, et parce que c'est le moment, je signale que je viens de trouver sur Bookfi le livre du Dr Pierre Barbet : "La passion de Notre seigneur Jésus-Christ selon le chirurgien". Même si je ne suis pas un inconditionnel du Suaire de Turin, je dois dire que ce livre est particulièrement intéressant.