Par ricochet
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Depuis qu'en l'année 635, T'ai Tsong – deuxième empereur de la famille Tang – les avait autorisés à s'établir en Chine, les chrétiens y vivaient en paix.
Venus de l'Occident lointain pour commercer, ils avaient même pu ouvrir quelques églises et monastères où ils célébrait le culte de la "religion lumineuse" dans leur étrange langue : le syriaque.
Oui, parce que – vu de Chine – Séleucie-Ctésiphon en Irak, c'est l'occident, bien sûr.
En paix avec les hommes, ils célébraient leur étrange divinité qu'ils disaient être "Trois-Un"1, priaient A-lo-ho, Mi-shi-ho et le Vent-Pur2.
Bref, tout se passait bien pour eux, de sorte qu'en 781, ils avaient même érigé une stèle tout ce qu'il y a d'officiel – avec dragons impériaux et tout et tout – racontant les 150 années de présence chrétienne dans la province de Xi'an et exposant les grands principe de la "religion lumineuse des Occidentaux"3.
Que s'est-il donc passé pour que tout bascule subitement, quelques années plus tard ?
En 843, la guerre gagnée contre les Ouigours laisse l'empire en faillite, et il faut relever les finances publiques.
D'un autre côté, les Bouddhistes – dont la religion étrangère s'est immensément répandue en Chine – ne sont pas sans poser de problèmes : non seulement ils attirent de fort nombreux jeunes chinois qui quittent leurs familles pour devenir moines, rompant le cadre familial traditionnel et ne particiant plus à la vie économique de la cité, mais en outre les monastères bouddhistes étant exemptés d'impots se sont fort enrichis.
Aussi, l'empereur Wu-Tsong décide de fermer les monastères bouddhistes, d'en confisquer les richesse et d'en récupérer les terres, afin que les moines et nonnes retournent dans leurs familles, recommencent à travailler de manière productive et payer des impots. Plus de 260 000 moines et nonnes rendus à la vie active.4
Une telle décision n'est pas pour déplaire aux intellectuels taoïstes, qui rêvent d'une Chine redevenue "chinoise".
Aussi, la mesure qui frappe les bouddhistes s'étend-elle aux autres "religions étrangères" : zoroastriens et chrétiens en font les frais.
Le christianisme en Chine ne s'en releva pas, jusqu'à ce que les chrétiens y reviennent, dans le sillage de la conquète mongole, au XIII° siècle.
Deux cent années de présence chrétienne pacifique furent anéanties en quelques mois et tombèrent dans l'oubli "par ricochet", pour des raisons économiques...
NB : l'illustration est une une peinture murale de la dynastie Tang d'une église Nestorienne à Khocho montrant la procession le dimanche des Rameaux.
Notes
1Dans les inscriptiosn chinoises chrétiennes, Dieu est désigné par l'expression "San-I".
2Aloho : transcription en caractères chinois du mot Dieu en Syriaque. De même pour Mishiho, pour le Christ. Quand au "Vent-pur" (Tsin-Fong), il désigne l'Esprit saint
3Le nom de "Ta-Tsin", qui désigne la région d'origine de ces chrétiens peut d'une certaine manière être considéré comme un équivalent du terme de "Roumis" (romains) que les arabes donnaient aux chrétiens... Je tente de sortir un petit document sur cette stèle et quelques autres textes de cette époque... peut-être aurai-je la possibilité de vous les partager un de ces jours.
4Voir le texte de l'édit de 845 sur Wikipedia